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Notes du label :
Le 27 janvier 2019, dans le cadre du festival VIVAT LA DANSE du Vivat d’Armentières, le duo Puce Moment proposait la première diffusion de leurs partitions écrites pour les orgues mécaniques du Café des Orgues d’Herzeele. Nous avons eu la joie d’en éditer l’enregistrement.
« Il y a quelque chose du réalisme fantastique dans cet opus. Comme à chaque fois que Puce Moment s’empare d’un instrument traditionnel, c’est à la manière d’un puppet master qui rencontre un personnage à mains nues.Ici, le duo crée un nouveau répertoire pour les 4 vieux orgues amis d’un cabaret de village qu’ils visitent depuis l’adolescence, pour une bouffée de pop étrange des fins de Dimanche.
Et on dirait que l’orgue limonaire parle ici sa langue à lui – ou à elle – pour la première fois. La musique mécanique a cet avantage de pouvoir exécuter des vitesses ou constantes non réalisables par des humains. Et cette machine s’exprime par la transe, les musiques répétitives, avec une sorte de frénésie, comme prise dans une course et dans les tourbillons de toutes ces décennies de dancing de croisée des chemins.
Au Japon, l’aura d’un objet provient de sa matière mais aussi des auras de ceux qui l’ont fabriqué et qui en ont pris soin. Cette aura est comme une âme pour qui croit en ce que Chris Marker nomme si bien « l’entre deux » : pas tout à fait un au-delà métaphysique mais plutôt un présent augmenté des traces de toutes nos histoires.
Donc la parole est à l’orgue rebaptisée O.R.G (comme dans CYBORG) et à son GHOST. Ceux qui dansent les dimanches à Herzeele depuis des décennies en avaient rêvé tant de fois : que l’automate désuète, presque survivante, s’hybride à une machine d’aujourd’hui. Que nos histoires et nos os ne fassent qu’un, dans un moment cyborg, pour un temps magique, comme celui de la fête et du time traveling. Un évènement pour de vrai, au sens politique même, une «transe-humanisme» – en opposition au transhumanisme robocop – car rien n’est plus gai quand ces dimensions ici cousues entre elles comme les chairs de la vieille frankenstein tiennent bon ensemble.
Pour célébrer tous ces déplacements, la musique inspirée par org à Puce Moment est donc une transe qui transporte. C’est son côté invitation au voyage dans les plis errants de l’ultralocal. Les morceaux portent les noms si curieux des communes rurales et périphériques de cette partie française de la Flandre Occidentale, frontalière de la Belgique, jadis zone de trafics en tous genre et de transgression… Comme si O.R.G y zonait de nuit ou y commerçait de jour : le boeuf, la graine, la fume, le pylône, la pale d’éolienne. Ou comme si O.R.G. se souvenait et agitait dans la danse de ses souvenirs tous ces voisinages, le défilé en spirale infinie des visages et des corps qui s’animent à son contact ».
Anna Czapski